Aujourd’hui, c’est un témoignage intéressant qui nous parle de la relation que l’on peut avoir avec les enfants même si on n’en veux pas. Si la croyance populaire laisse à penser que les childfree ne les aiment pas, ça n’est pas toujours vrai.
– Salut Cécile, peux-tu nous parler un peu de toi ?
– Salut ! J’ai 26 ans et je suis en train de terminer un master d’enseignement des arts plastiques. Autant dire que je m’apprête à côtoyer un bon paquet d’adolescents en tout genre ! Cependant ce choix de carrière n’a pas vraiment influencé mon choix de ne pas avoir d’enfants, du moins je pense. Je suis de nature assez casanière et j’aime autant passer du temps seule qu’avec des proches.
– Qu’est-ce qui, selon-toi, a influencé ton choix de ne pas faire d’enfant ?
– Je pense que c’est venu progressivement. Petite je jouais très peu avec des poupons, ça ne m’intéressait pas trop. En grandissant j’ai toujours été un peu mal à l’aise avec les bébés et les enfants, je ne savais pas comment agir avec eux. Je ne comprenais pas trop l’intérêt du schéma classique « rencontre, mariage, emménagement, enfant ». De plus, il y a dans mon entourage des femmes qui n’ont jamais eu d’enfants et qui ont pourtant eu un parcours accompli et une vie épanouie, c’est ce qui m’a menée à penser que oui : on peut faire ce choix. Loin de moi l’envie de dire qu’on peut être moins épanoui avec un enfant, beaucoup de parents sont extraordinaires et je les admire, mais je sais au fond de moi que ça ne me correspond pas.
– En as-tu déjà parlé dans ton entourage ? Quelles ont été les réactions ?
– Oui, j’ai toujours été très claire avec ma famille, mes amis et mes copains. Ma famille, particulièrement ma mère, continue de me dire que je changerai d’avis, que c’est bien d’avoir un enfant, qu’on est triste quand on devient vieux et qu’on n’en a pas…etc. Mais je garde mes convictions, même si parfois on s’engueule un petit peu, je sais que ce n’est jamais vraiment méchant. Certains membres de ma famille comprennent mon choix, d’autres non, je m’y suis faite. J’ai mis mon copain actuel au courant dès les débuts de notre rencontre : s’il devait se passer quelque chose de sérieux entre nous, il fallait qu’il sache que non, il n’y aurait pas d’enfants avec moi, et il était d’accord avec ça aussi. Il nous est arrivé d’en reparler et nous avons toujours les mêmes positions. Nous ne sommes jamais à l’abri d’un changement d’avis mais nous savons qu’il y a peu de chances que ça arrive, et dans tous les cas communiquer reste la meilleure solution.
– Dirais-tu que c’est un choix compliqué ?
– Je ne l’ai jamais vécu comme un choix compliqué, j’accorde peu d’importance à ce que pensent les autres là-dessus. C’est certes difficile à faire accepter à certains proches, mais il s’agit de notre choix, pas du leur. Il faut faire abstraction. Je n’en parle pas trop sur les réseaux sociaux car ça ne regarde pas les autres. Jusqu’à peu, je n’avais pas conscience de la virulence de certaines personnes à l’égard des childfree, je trouve ça un peu dingue. Aussi je dirais que ça peut être compliqué lorsque l’on cherche un ou une partenaire, cela peut être difficile de trouver quelqu’un en accord avec notre choix.
– Pendant plusieurs années, tu as fait de la garde d’enfant, tu peux nous parler de cette expérience ?
– Oui j’ai gardé deux petites filles lorsqu’elles étaient âgées de 4 mois jusqu’à leurs 3 ans durant 4 à 5 jours par semaine, donc sur une assez longue période. Je continue de les garder pendant la plupart des vacances scolaires. Cette expérience a pu me faire prendre conscience de tout ce qu’un enfant peut impliquer. On me dit souvent « Ouais mais ce ne sont pas les tiens ! » et c’est vrai, mais il n’empêche que je les ai gardés et je m’en suis occupée comme si c’était les miens. La garde d’enfant m’a fait comprendre que cela demande beaucoup de temps, d’investissement personnel, de remise en question, de stress… S’occuper d’un enfant ça veut dire être constamment en alerte de tout ce qui peut arriver, être à l’écoute, trouver des idées pour qu’ils ne s’ennuient pas, ne soient pas tristes, ne manquent de rien. C’est très, très fatigant. Je ne regrette pas de le faire, mais ça m’a énormément confortée dans l’idée que non, je n’étais pas faire pour avoir des enfants.
– Quel relation entretenais-tu avec ces enfants ?
– J’ai une bonne relation avec les enfants, en général ils m’aiment bien et je les aime bien aussi, je trouve qu’on peut leur apprendre plein de choses mais aussi que sans le savoir ils nous font apprendre plein de choses. D’une manière générale je dirais que je suis une bonne tata. J’ai aussi tendance à beaucoup me remettre en question lorsque je m’énerve parce qu’un enfant a fait une grosse bêtise, j’essaye de mieux apprendre à gérer mes émotions et à être plus compréhensive avec eux. Et ça, je trouve que c’est le plus difficile à faire, j’ai toujours peur de leur faire de la peine et qu’ils ne m’aiment plus. Mais à côté de ça j’adore chercher à créer de nouvelles activités pour eux et voir ce qui leur plaît ou non, et leur faire découvrir plein de choses aussi, c’est génial de pouvoir leur transmettre des choses. Donc pour résumer je dirais qu’avoir de bonnes relations avec les enfants ne m’empêche pas de penser que je n’en veux pas.
– Selon toi, qu’est-ce que pourrait t’apporter une vie sans enfant ?
– J’ai plein de passions, je suis tout le temps occupée, je ne m’ennuie jamais. Alors, ne pas avoir d’enfant cela me laissera assez de liberté pour faire presque tout ce que je veux quand je veux. Je ne veux pas avoir à me soucier d’un petit être qui a besoin d’énormément d’attention et d’amour, je trouve que c’est une lourde charge et je ne me sens pas capable d’assumer cela pour toujours. J’ai besoin d’être libre d’être seule quand je le veux, de faire ce que je veux quand l’envie se fait, et d’aller où bon me semble. Ca peut paraître égoïste mais il n’y a que comme ça que je me vois vivre.
– Le mot de la fin ?
– Je pense que le plus important c’est d’écouter ses propres envies, et de faire ses propres choix. Chacun mène la vie qu’il veut et ça, personne ne peut le décider à notre place. Faire accepter ses choix n’est pas une obligation, le plus important c’est de vivre comme bon nous semble et de toujours faire passer son bonheur avant. Ca fait un peu phrase bateau mais je pense que ça reste important de le rappeler. Vous ne serez jamais seuls à avoir fait de genre de choix.