Pourquoi les professionnels de santé sont-ils si réticents à pratiquer la stérilisation définitive et volontaire ?

Voilà maintenant plus de 20 ans maintenant que je « milite » pour la communauté childfree et s’il y a bien un sujet qui a le don de m’agacer, c’est celui du milieu des professionnels de santé. Alors que la stérilisation définitive est la méthode la plus sûre et la plus durable, le nombre de refus face aux demandes conscientes et réfléchies sont toujours aussi importants.

Tu vas regretter

D’expérience, l’argument le plus régulièrement avancé est celui d’un regret qui pourrait naître sur le tard. Si les chiffres que l’on trouve ici et là parlent de 5% de personnes qui, effectivement, regrettent leur stérilisation définitive. Ce sont des études qui ne portent que sur un faible échantillon de personnes dont on ne sait pas grand chose mais en admettant qu’il soit représentatif, ce sont 95% des personnes qui ne regrettent pas leur choix. On pourrait aussi évoquer le fait que 20% des parents regrettent d’avoir eu des enfants. Autant dire que lorsqu’il est réfléchi et que la demande vient de quelqu’un d’informé et conscient, l’excuse ne tient pas.

La peur du procès vient en seconde position des arguments avancés par les professionnels de santé. Après avoir longuement cherché pour cet article et si je me base sur mes longues années à m’intéresser au sujet, je n’ai pas trouvé un seul cas de ce genre. Il est possible que je sois passé à côté de quelque chose mais il est peu probable que ce genre de plaintes aient été déposées quelque part. Bien que cela reste hypothétiquement possible, ça n’est pas recevable. Une personne devrait pouvoir faire ce qu’elle veut de son corps.

Conformité sociale

Alors que l’on pourrait penser que les professionnels de santé sont issus de milieux intellectuels et font partie d’une certaine élite, les stéréotypes vont bon train chez de nombreux praticiens. Pour beaucoup d’entre-eux, il reste encore inconcevable qu’une personne puisse faire le choix de ne pas vouloir d’enfant. D’ailleurs, sur ce point, ce sont plus les femmes qui sont le plus touchées par cette vision assez archaïque. Des retours que j’en ai pu avoir, les hommes rencontrent moins de difficultés à se faire stériliser volontairement. En plus des clichés vient s’ajouter un zeste de sexisme, on n’est plus à ça près.

Certains praticiens ont même certains critères pour autoriser une intervention. Si on peut discuter de l’aspect légal de la chose, nombreux préfèrent attendre que leurs patients aient dépassé un certain âge ou aient des déjà des enfants, fasse un conservation de sperme (qui ne sera pas remboursée dans ce cas) et imposent parfois une consultation psy. Si ce dernier point peut être utile lorsque l’on a un doute sur la conscience du patient, ces autres critères sont grandement discutables. Si on ne veut pas d’enfant, pourquoi devrait-on passer par le CECOS et débourser une centaine d’Euros ? Ça n’est pas acceptable si on est sûr de son choix.

Evolution des mentalités

Si ces pratiques peuvent être discutables, ces dernières années, j’ai tout de même constaté un changement de ton de la part des professionnels de santé. J’imagine que des personnes remplacent de vieux médecins qui n’étaient plus trop à la page à la fin de leur carrière. C’est d’autant plus vrai que le nombre de personnes qui ne désirent pas d’enfant est en constante augmentation. En tout cas, de nombreux témoignages de refus arrivent jusqu’à mes oreilles régulièrement et surtout envers les femmes. C’est une chose qui doit changer.

Ne pas vouloir d’enfant ne signifie pas que l’on a un problème. Pour côtoyer depuis toutes ces années la communauté childfree, dans la grande majorité des cas, il s’agit d’un choix très réfléchi, parfois plus que celui de faire un enfant, justement. On ne fait pas un bilan psychologique des personnes qui veulent procréer alors pourquoi cela devrait-il être le cas pour ceux qui ne le veulent pas ? En tout cas, on sent bien que les lignes bougent sur ces questions mais ils seraient intéressant que les professionnels de santé ne soient plus dans le jugement ou les stéréotypes de vie. Certains praticiens sont plus ouverts que d’autres. La plus grande difficulté reste de trouver le bon.